Dans un coup de
tonnerre qui secoue la République Démocratique du Congo, le ministre de la
Justice, Constant Mutamba, a fait une entrée fracassante à la prison centrale
de Makala à Kinshasa, où une tentative d’évasion a dégénéré en un carnage
atroce, tuant 129 détenus dans la nuit du 1er au 2 septembre. De retour d'une
mission au centre du pays, Mutamba, visiblement furieux, n’a pas mâché ses mots
: « Je viens d'atterrir et, croyez-moi, je règlerai cette affaire en deux
semaines. J'ai alerté à maintes reprises, mais tout le monde s'est ligué contre
moi. Voilà le résultat ! C'est un sabotage des actions du Chef de l'État, et
cela ne passera pas inaperçu. Chaque semaine, les magistrats envoient des
détenus ici sans tenir compte de la capacité de la prison. »
Mutamba a
vivement rejeté la thèse officielle d’une évasion, qualifiant les événements de
« sabotage », et accusant directement les magistrats d’être à l’origine du
problème. « Vous venez ici et vous faites sortir les gens clandestinement.
C'est un acte de sabotage, ce n'est pas une évasion. » Selon lui, les
magistrats ont systématiquement ignoré ses efforts pour désengorger la prison
en envoyant un nombre excessif de détenus, exacerbant ainsi la crise. « Toutes
les fois où j'ai désengorgé, ils ont envoyé le double. Depuis que j'ai
commencé, combien de détenus ont été envoyés ici après le désengorgement ?
C'est là où on saura d'où est parti cet acte de sabotage. On va sérieusement
sanctionner. »
Le chaos à
Makala semble désormais sous contrôle après trois jours de turbulences. La
Première ministre Judith Suminwa s’est rendue sur place pour évaluer les dégâts
et superviser la reprise des activités pénitentiaires. Les autorités ont fixé
un objectif ambitieux : réduire de moitié la population carcérale de Makala,
une prison initialement conçue pour 1 500 personnes mais qui en abrite
actuellement près de 15 000.
En parallèle, le
Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a exhorté les magistrats à
poursuivre leurs fonctions malgré les récentes directives du ministère de la
Justice, qui ont restreint les transferts de détenus vers Makala et la prison
militaire de Ndolo. Le CSM a vivement réagi aux propositions du Vice-ministre
de la Justice, mettant en évidence les tensions croissantes au sein du système
judiciaire.
Le Dr. Marcelin Ndombele, spécialiste en droit pénal, offre une perspective critique : « La réaction du ministre Mutamba, bien que compréhensible dans le contexte de cette tragédie, risque de détourner l'attention des véritables enjeux. Le problème n’est pas seulement la gestion de la prison, mais un système judiciaire globalement défaillant. Le sabotage dont parle Mutamba est symptomatique d’une crise plus profonde dans le traitement des détenus et la gestion des établissements pénitentiaires. »
De son côté, le Professeur Marie-Claire Ndebele, expert en gestion des crises, insiste sur la complexité de la situation : « La situation à Makala est tragique, mais il est crucial de ne pas attribuer toute la responsabilité à une seule partie. Le désengorgement des prisons est un processus complexe qui nécessite une approche coordonnée entre différents acteurs. Les accusations de sabotage doivent être examinées dans le contexte plus large des défis de gestion carcérale. Une réforme structurelle est essentielle pour éviter de futures tragédies. »
Ce drame à Makala révèle non seulement les failles du système pénitentiaire congolais, mais aussi les fractures profondes au sein du gouvernement. Les accusations mutuelles et les tensions croissantes ne doivent pas masquer l’urgence d’une réforme systémique. La RDC doit impérativement prendre des mesures décisives pour rétablir l’ordre et la justice dans ses établissements pénitentiaires, afin d’éviter que de telles tragédies ne se reproduisent. La prise en charge de cette crise doit être globale et orientée vers des solutions durables pour restaurer la confiance et la sécurité.
Par Lukeni Fwamba Donatien