La
République Démocratique du Congo (RDC) se lance dans une réforme audacieuse :
intégrer l'initiation au tourisme dans les programmes d'enseignement, de la
maternelle au niveau universitaire. Cette initiative, discutée lors d’un récent
panel gouvernemental à Kinshasa, suscite à la fois enthousiasme et scepticisme.
Le
vice-ministre de l’Éducation nationale et nouvelle citoyenneté, Jean Pierre
Keza Mudru, soutient vigoureusement cette nouvelle orientation. Selon lui,
enseigner le tourisme dès le plus jeune âge est crucial pour « éveiller les
enfants à la beauté de leur pays et leur inculquer les bases d’une carrière
prometteuse dans ce secteur ». Il insiste sur le fait que le tourisme est une
source potentielle de richesse qui doit être exploitée dès le début de la
scolarité. "Le tourisme est une forme d’argent qui ne se voit pas, mais il
est essentiel. Nous devons intégrer cette culture dès l'école primaire pour
préparer une génération qui valorisera notre patrimoine naturel",
affirme-t-il.
Cependant,
certains experts mettent en garde contre les risques de cette initiative. «
Introduire le tourisme dans les programmes scolaires pourrait se transformer en
une manœuvre de distraction plutôt qu’en une véritable réforme éducative »,
prévient un analyste de l'éducation. Selon lui, la priorité devrait être de
renforcer les bases académiques avant d’ajouter des matières qui pourraient se
révéler superflues. Il craint que cette initiative ne soit qu’un prétexte pour
attirer des financements sans réelle valeur ajoutée pour la qualité de
l’enseignement.
De
son côté, la ministre de l’Enseignement supérieur, Marie-Thérèse Sombo,
applaudit la transversalité de la formation et voit le potentiel de cette
réforme pour susciter un patriotisme touristiquement orienté. Elle appelle à
promouvoir les potentialités touristiques du pays tout en renforçant le
marketing pour attirer des visiteurs étrangers. « Le tourisme est une vitrine
pour notre pays, et il est de notre devoir de former des citoyens qui pourront
non seulement en profiter, mais aussi le promouvoir avec fierté »,
explique-t-elle.
Le
ministre de la Formation professionnelle, Marc Ekila, voit également cette
initiative comme un tremplin pour la création d'emplois. Il encourage une
collaboration étroite avec le ministère du Tourisme pour intégrer efficacement
cette nouvelle filière. « Le mariage entre tourisme et formation
professionnelle peut générer des opportunités d’emploi significatives »,
souligne-t-il.
Dans
un contexte de réformes multiples, cette nouvelle orientation pose la question
de savoir si la RDC est prête pour un tel bouleversement éducatif. Si certains
y voient une opportunité de valoriser le patrimoine national et de stimuler
l’économie, d’autres redoutent que ce projet ne serve de couverture à des problèmes
plus profonds dans le système éducatif. La réussite de cette initiative
dépendra donc de la manière dont elle sera mise en œuvre et des résultats
qu'elle produira sur le terrain.
Par Muamba Ngoy Linda